Les aventures de Petitboutdpaind’épice (10)
Les aventures de Petitboutdpaind’épice
Chapitre 10 : C’est la rentrée !
D’un bout à l’autre de la maison, Petitboutdpaind’épice n’entendait que cette courte phrase exclamative :
- C’est la rentrée !
Bien sûr, il ne savait absolument pas ce qu’elle voulait dire, car il n’en percevait que les sons, mais l’enthousiasme débordant que cette suite de cris entraînait faisait naître en l’oiseau une excitation particulière. Il s’agitait autant que Floriane qui parcourait les pièces et les couloirs en moulinant des bras. Celle-ci confia à sa mère combien elle était heureuse de revoir sa maîtresse, madame Martin.
- Tu n’oublieras pas de remercier son mari, le directeur. Il est très gentil d’accueillir ton petit oiseau dans son établissement.
Floriane acquiesça et continua ses allées et venues en répétant son refrain :
- C’est la rentrée ! C’est la rentrée !
En réalité, les enfants de l’école primaire n’avaient école que le lendemain, mais la fillette était impatiente d’y aller avec son petit oiseau.
Petitboutdpaind’épice continuait d’écouter les sons de ce refrain qu’il connaissait par cœur. Il voulut imiter les intonations de Floriane. Hélas, les sons qui sortirent de son bec ne ressemblaient en rien à ceux émis par la fillette. Il se mit à s’entraîner.
- Quelle cacophonie ! s’écria Rosalie qui descendait l’escalier à ce moment-là, on ne s’entend plus penser dans cette maison.
La sœur aînée de Floriane caressa Petitboutdpaind’épice qui venait de se poser sur la poignée de la porte de la cuisine.
- Tu seras bien sage à l’école, n’est-ce pas ?
Pour toute réponse, l’oiseau essaya de crier :
- C’est la rentrée !
Encore raté. Il était loin d’être au point. Ses cris devenaient même si étranges que le père des deux filles l’examina.
- Il ne semble pas malade, pourtant, affirma-il.
- Oh non, le rassura Floriane, il est tout plein de forme !
Son père sourit, comme à chaque fois que l’enfant laissait échapper une expression maladroite.
- On dit : il est en pleine forme, rectifia-t-il. Je trouve tout de même étrange que son chant habituel soit aussi peu reconnaissable.
Floriane fit une moue expressive. Elle plissa les yeux et ouvrit grand la bouche : signe qu’elle réfléchissait. Elle leva son index.
- Petitboutdpaind’épice a peut-être peur de la rentrée, dit-elle, je vais emmener son couffin à l’école pour le rassurer !
Elle remonta dans sa chambre où l’oiseau s’était réfugié pour s’entraîner à chanter le refrain de Floriane. Celle-ci le trouva perché sur le coussin du berceau d’enfant qui était près de la fenêtre.
Petitboutdpaind’épice ouvrit les yeux, ébouriffa ses plumes et se gonfla pour répéter après Floriane le refrain guilleret. Mais ses cris se firent plus étranges encore.
- Oh, Bout d’épice, dit l’enfant, il ne faut pas avoir peur de l’école, c’est très amusant, tu verras !
Et elle continua de chanter, décourageant sans le savoir le petit oiseau qui percevait encore d’autres sons dans la voix de ce petit être géant à qui il portait beaucoup d’affection. Soudain, il releva le tête et s’envola par la fenêtre.
- Reviens, supplia Floriane, nous ne devons pas être en retard pour notre premier jour d’école!
Madame Hugues prenait son café dans la véranda lorsqu’elle aperçut le volatile. Vite, elle courut mettre son chat Mitchou à la cuisine et accueillit Petitboutdpaind’épice qui se posa sur son avant-bras. Ce dernier pépiait :
- C’est la rentrée !
- Oh, s’alarma la voisine en s’asseyant, que t’arrive-t-il pour que ton chant soit aussi faux ?
L’oiseau continua de crier. Au bout de cinq minutes, madame Hugues sauta sur ses pieds. Petitboutdpaind’épice décolla en battant des ailes avant de se poser de nouveau sur le bras dodu.
- Je comprends ! Tu veux reproduire l’exclamation exacte que Floriane lançait dans son jardin hier soir !
Ce fut un cours de chant insolite. Madame Hugues claquait des doigts en rythme, tapait du pied et laissait des sons clairs et aigus s’échapper de sa gorge tandis qu’elle claironnait :
- C’est la rentrée !
Patiemment, la voisine lui apprit à pépier correctement la musique jusqu’à ce qu’il répète parfaitement les sons de Floriane.
La fillette marchait tristement à côté de ses parents avec le couffin. Son oiseau n’était pas revenu à temps pour le premier jour d’école. Certainement, il ne voulait pas aller en classe avec elle.
Tout le monde fut très déçu, car tous attendaient Petitboutdpaind’épice : le directeur, la maîtresse et tous les élèves. Une fois les retrouvailles faites et l’appel terminé, madame Martin réclama le silence.
- Le directeur va faire un discours, annonça-t-elle. Soyez respectueux et silencieux lors de son élocution. Ce serait en effet dommage de commencer l’année scolaire avec une punition !
Les élèves suivirent les consignes et écoutèrent monsieur Martin avec attention…
Lorsque Petitboutdpaind’épice revint à la maison, il trouva la fenêtre de Floriane fermée. En faisant le tour de la villa, il se rendit compte qu’il ne pouvait plus entrer. Il s’affola. Madame Hugues s’en rendit compte et l’amena elle-même à l’école. Après avoir frappé à toutes les salles de classe, on lui indiqua aimablement celle de Floriane. Collant son oreille contre la porte, elle entendit la voix du directeur qui s’adressait à ses élèves. Ne voulant déranger personne, elle entrouvrit la porte du fond et laissa discrètement l’oiseau s’envoler à l’intérieur.
Heureux de reconnaître Floriane, Petitboutdpaind’épice se posa sur la table face à elle, ébouriffa ses plumes et se gonfla, avant de lancer dans un joyeux piaillement mélodieux qui fit sursauter tout le monde, y compris le directeur :
- C’est la rentrée !
(à suivre dès le 15 septembre)